Infos sur le glyphosate, septembre 2023

On nous reparle à nouveau dans les médias ces derniers jours, du fait de proches décisions européennes, du « scandale du Glyphosate ».

Hélas, c'est toujours en se référant aux protestations de lobbys écologiques, dont on peut comprendre les motivations, mais dont les avis reposent en l'occurence sur de mauvaises informations, fausses ou incomprises par incompétence, et je me désole (comme si souvent!!) que les médias ne parviennent pas à se faire aider de conseils compétents !

 

Un préambule :

Tout produit peut être toxique, si l'on ne fait pas attention à la dose utilisée.

Quelques exemples ...

·      Prendre un verre de Punch de temps en temps ne donne aucun risque, quand prendre 1/2 litre de rhum tous les jours ne vous ferait pas vivre bien longtemps...

·      La France s'est émue ces derniers mois – et on le comprend - du manque de Paracétamol (notre Doliprane®). Mais il faut savoir que c'est le premier moyen de suicide en Grande Bretagne...

·      Comme interne, il m'est arrivé souvent de prescrire de la Digitaline, qui a sauvé la vie de certains de mes malades cardiaques, alors qu'une dose simplement triple était utilisée par des criminels d'Agatha Christie.

 Je pourrais continuer longtemps la liste (évoquer par exemple la fameuse Hydroxychoroquinine de Raoult, médicament dont ce qu'on appelle « la fenêtre thérapeutique », c'est-à-dire la fourchette de doses entre ce qui est efficace et ce qui est toxique, est très courte, ce qui a expliqué les excès de morts que ce traitement a entraîné au cours de la COVID) etc ...

C'est évidemment vrai aussi pour tous les produits utilisés dans l'Agriculture, raison pour laquelle c'est si surveillé (il y a des institutions de contrôle nationales, maintenant souvent aussi européennes, qui établissent les limites de dose autorisées (très inférieures aux doses où une toxicité est prouvée) et font très régulièrement des dosages de contrôle sur les produits, dans la nature, dans les cours d'eau...).

Glyphosate et risque de cancer.

Pourquoi ce sujet ?

Parce que l'OMS, dont le premier rôle est d'être un organisme d'alerte, a évoqué en 2015 la possibilité d'un risque cancérigène (qualifié de « probable ») sur des études chez le rat.

D'où le message répété dans les médias sans comprendre de quoi il s'agit...

C'est à cause de cette alerte de l'OMS que de nombreuses et vastes études épidémiologiques ont été lancées dans le monde. J'en ai fait une analyse publiée dans la revue Médecine (que je vous mets en fichier joint), ce qui a incité la Gendarmerie Nationale à me convoquer, il y a deux ou trois ans, comme expert dans l'enquête qui a été lancée sur le sujet.

Comme vous le lirez, ce risque cancérigène n'a pas été confirmé. Mais on n'est pas très étonné, car les doses analysées dans les deux expériences (sur quatre) qui étaient suspectes chez les rats étaient gigantesques et invraisemblables dans la vraie vie (on les a comparées à la prise d'un tiers de litre de Glyphosate qu'ingurgiterait par jour un agriculteur).

Comme vous le verrez aussi à la lecture des résultats d'une grande étude lancée en France dans le milieu agricole (Agrican), non seulement il n'y a pas d'augmentation du risque de cancer chez les agriculteurs (les plus susceptibles d'avoir des surdosages de glyphosate ou de pesticides divers), mais il y a même une diminution significative de ce risque – sauf apparemment pour le mélanome, cancer favorisé par l'exposition au soleil.

C'est la raison pour laquelle toutes les (nombreuses) agences sanitaires du monde (comme l'ANSES en France), qui ont lancé des enquêtes épidémiologiques, ont conclu à l'absence de risque cancérigène du glyphosate.

Et qu'on ne me dise pas que tous les universitaires que nous sommes sont « pourris » et « achetés » par Monsanto, etc... Dans ma fonction de professeur de Thérapeutique, j'avais la charge de faire des analyses des publications scientifiques et d'expliquer aux étudiants comment les faire avec esprit critique...

Risques des herbicides comme le glyphosate et des pesticides

En dehors des risques pour la santé, dont on a vu qu'ils ont été exagérés, ces produits peuvent avoir des conséquences dans le domaine écologique. Il est naturel qu'on s'y intéresse.

Il faut savoir que tout « n'est pas tout blanc ou tout noir », et cela entraîne des choix à faire...

Ces produits, en moyenne, doublent le rendement des cultures (c'est pour cela que les agriculteurs y tiennent).

L'élément négatif est qu'ils réduisent notablement la « biodiversité » (animale et végétale). C'est incontestable.

En revanche, élément positif et attendu : il a été montré qu'ils réduisent de moitié la déforestation par rapport aux méthodes dites « bio » - dont toutes, d'ailleurs, ne sont pas anodines pour la santé, comme la « bouillie bordelaise » qui expose au risque d'intoxication au cuivre, avec ses risques rénaux.

quelques explications pour les « non médecins » concernant mon article..

Un adénome hépatique est une tumeur bénigne du foie. Un hépatocarcinome est un cancer du foie.
Dans les études épidémiologiques, les plus valides sur le plan scientifique sont ce qu'on appelle les « études de cohorte ». Il s'agit de suivre de façon « prospective » deux groupes de sujets, l'un ayant le paramètre étudié (ici: contact avec le glyphosate), l'autre non.
Le deuxième type d'études , en général rétrospectives, consiste à effectuer ce qu'on appelle des études « cas-témoins » , en recherchant un « témoin neutre » par rapport à un sujet soumis au facteur de risque. C'est beaucoup plus difficile d'éviter des biais.
 
Dr Philippe Casassus PU-PH en thérapeutique, Université Sorbonne-Paris Cité
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