L'HOMEOPATHIE : SON OBJET, SA METHODE ET SON APPORT A LA MEDECINE

Dr Philippe Marchat

mai 2023

         

Nous, Société Savante d’Homéopathie, avons décidé d’écrire et partager ce texte, dans le souci de présenter, de façon apaisée et dépassionnée, ce qu’est cette approche médicale, quel est son objet, sa méthode et quels sont ses apports et contributions à la connaissance biologique et médicale. 

Rappelons, tout d’abord, comme l’a précisé Georges Canguilhem, que la médecine n’est pas une science mais « un art au carrefour de plusieurs sciences ».  

Rappelons, aussi, que l'homéopathie a, comme toute branche de la médecine et comme toute discipline médicale, pour but et finalité, de conserver et restaurer, si besoin, l’état de santé.

          Rappelons, enfin, que toute discipline se définit par un objet et une méthode qui lui sont propres et qu’elle se caractérise, aussi, dans son domaine d’application, par des apports et contributions qui, certes, lui sont propres mais sont à verser au fond commun des connaissances et données dudit domaine.

          Nous présenterons, donc, ici, l'homéopathie avec ces visées comme horizon.

Les données qui suivent nous paraissent, ainsi, constituer une base à partager avec tous si l’on veut pouvoir, enfin, entamer un débat serein, sans complaisance mais loyal, sur l'homéopathie. Ce débat, nous souhaitons l’ouvrir avec toutes les disciplines concernées par l’être humain, en particulier, et le vivant en général, qu’elles soient médicales, biologiques, psychologiques ou relèvent des sciences de l’homme plus globalement.

L’OBJET BIOLOGIQUE DE L'HOMEOPATHIE

Commençons par rappeler que l’objet d’une discipline est ce qu’elle prend en compte, la matière qu’elle considère et sur laquelle elle travaille.   

Ainsi, l’on peut dire que l’objet de la biomédecine est constitué des  paramètres (cholestérol, triglycérides, glycémie, acide urique, etc.) et mécanismes biologiques (inflammation, auto-immunité, etc.), des médiateurs chimiques (sérotonine, histamine, dopamine, etc.) des enzymes, agents viraux, bactériens, etc. en un mot, de l’ensemble des facteurs biologiques élémentaires qui jouent un rôle dans les maladies.

L'homéopathie, elle, prend en compte une autre dimension biologique, également fondamentale, du vivant. Son objet, ce qu’elle prend en compte pour soigner, la « matière » qu’elle considère, est le patient pris dans sa dimension d’individu vivant.     

Ce concept d’individu vivant, parce qu’il contient 5 idées qui lui sont consubstantielles, permet de mieux saisir en quoi l’homéopathie s’appuie sur une réalité biologique fondamentale. Passons les en revue.

1°) Unicité, singularité de chaque patient, de chaque cas clinique et donc du traitement homéopathique de celui-ci

Le premier intérêt du concept d’individu vivant est de rappeler que chaque patient, chaque être humain, est un être singulier, unique et différent de tout autre, ce que confirment largement la génétique, chacun ayant un génome unique, différent de tous les autres, l’immunologie, avec les problèmes de compatibilité et de rejet en cas de greffes, et, plus prosaïquement, le caractère unique de nos empreintes digitales. De ce fait, il est logique que chaque maladie possède, elle aussi, une expression clinique singulière, propre au patient, ce qui donne à la démarche homéopathique qui individualise le traitement de chaque cas en fonction de ses caractéristiques singulières un fondement biologique certain.    

2°) Réalité de la globalité du fonctionnement biologique que prend en compte l'homéopathie 

Le terme d’individu, du latin in-divis, a un second sens, celui de non division, et désigne, outre l’unicité de chacun, l’unité et l’absence de division interne de l’organisme.

La notion d’individu rappelle, ainsi, que l’être humain n’est pas un simple assemblage de cellules, de tissus et d’organes mais que c’est, au contraire, une totalité indivisible et solidaire, toujours unifiée. Cette notion est, largement, étayée par l’étude du développement de l’être humain qui, partant d’une première cellule issue de la fusion des deux gamètes parentaux, aboutit, par divisions et différenciations successives à la formation des tissus puis des organes multiples qui constitueront, au final, l’organisme. Mais cette différenciation ne doit pas faire oublier que tous ces organes obéissent à une organisation et un fonctionnement intégrés profondément unifiés.

Ainsi, quand l'homéopathie prend en compte le tableau global du patient, l’ensemble de ses manifestations pathologiques considéré « comme un tout », elle ne fait qu’être fidèle à la réalité biologique même et enrichit, en réalité, sans la contester ni s’y opposer, la connaissance biomédicale qui intervient, elle, sur tel ou tel mécanisme élémentaire et localisé du fonctionnement biologique.

3°) La sémiologie « originale » et vécue de l'homéopathie s’enracine dans le concept biologique d’Individu Vivant

L’idée de vivant est, là aussi, essentielle et montre que la prise en compte, à côté et en complément des données objectives, biologiques et radiologiques, de la façon dont le patient est et se vit malade, possède, elle aussi, une base biologique solide. C’est pourquoi, par exemple, l'homéopathie prend en compte, pour asseoir sa prescription dans un cas de migraines, le vécu subjectif de la douleur (sensation de compression du crâne, « comme un casque » ou, à l’inverse, sensation que la tête va « exploser »).

4°) Rappel de l’importance des capacités naturelles d’auto-guérison qu’optimise l'homéopathie

L’idée de vivant, rappelle, aussi, que l’organisme dispose, naturellement, de capacité d’auto-guérison, d’auto-défense et d’homéostasie. Capacités naturelles qui ont permis, depuis l’origine, à l’espèce humaine, de survivre jusqu’à nos jours.

Bien sur, celles-ci ne sont nullement infinies et c’est ce qui fait que les apports de la biomédecine sont incontournables et essentiels. Il faut, en effet, savoir se substituer à l’organisme quand les capacités naturelles d’auto-guérison sont dépassées, et c’est le champ d’excellence de la médecine conventionnelle.

Mais il faut, tout autant, savoir aider l’organisme à se rééquilibrer à chaque fois que ses défenses sont potentiellement aptes à faire face à la pathologie. Et ceci est le champ d’excellence de l'homéopathie. Ne pas le faire, quand c’est possible, c’est affaiblir l’organisme, l’empêcher de retrouver un fonctionnement plus optimal. Par où, l’on retrouve la profonde complémentarité entre homéopathie et biomédecine.

5°) En tant qu’individu vivant, chaque patient est dans un état d’équilibre singulier avec son écosystème

Cet état d’équilibre, ou de déséquilibre, d’ l ‘organisme avec son environnement est le fondement biologique de la prise en compte, par l'homéopathie, de ce qu’elle appelle les « modalités d’amélioration ou d’aggravation » de la pathologie du patient. Ces modalités, la biomédecine ne les ignore pas mais ne parvient pas à y faire place en pratique. Nous citerons, par exemple, la prise en compte de l’aggravation de nombreux patients asthmatiques quand ils sont exposés à un climat très humide et/ou dans des circonstances de stress important, la présence de ces deux facteurs débouchant, en homéopathie, sur le choix de médicaments homéopathiques particuliers.

On notera, au passage, que l'homéopathie fait montre, ici, d’une dimension écologique qui manque, pour le moment, à la démarche biomédicale.

LA METHODE DE L'HOMEOPATHIE

Parler de la méthode de l'homéopathie revient à préciser la façon dont l'homéopathie s’y prend, face au patient, pour conserver et/ou restaurer sa santé.

Quatre notions, intimement corrélées, jouent, ici, un rôle essentiel.

          1°) Recherche de la similitude maximale entre le tableau (global et singulier) de la maladie et celui du potentiel curatif du médicament homéopathique à prescrire. On retrouve cette notion dans le nom même d’homéopathie qui signifie « semblable souffrance ».

          2°) Prise en compte des signes et symptômes qui singularisent le cas : l’individualisation homéopathique. Elle consiste à prendre en compte, de façon valorisée, les signes les plus singuliers du cas. Par exemple, une faim augmentée et inattendue, donc singulière, d’un patient souffrant d’un état infectieux, orientera vers des médicaments homéopathiques particuliers.

          3°) Prise en compte de la globalité du tableau clinique, en partant du principe que, même dans les maladies apparemment locales, des manifestations concomitantes variées, existent, pour peu qu’on les cherche, qui signent la dimension globale de celui-ci.

          4°) Reste la question des dilutions infinitésimales homéopathiques. Il est certain que l’utilisation de substances aussi diluées heurte le sens commun et semble, même, pousser l'homéopathie hors de la rationalité scientifique puisqu’au delà de la dilution 9 CH, les médicaments homéopathiques semblent ne plus pouvoir contenir de molécule de la substance qui leur donne leur nom.

Pour autant, des données de recherche permettent de démontrer la réalité biologique et clinique des hautes dilutions, plusieurs études fondamentales ayant établi que, si deux dilutions homéopathiques de deux substances X et Y en 15 CH sont bien constituées, au plan chimique, de molécules identiques (celles du substrat), elles possèdent par contre, des structures différentes l’une de l’autre au plan physique. On rappellera, ici, que la glace et l’eau sont identiques au plan chimique tout en étant fort différentes au plan physique.

D’autres recherches visent à élucider les mécanismes d'action de ces hautes dilutions. De ce point de vue, deux grandes hypothèses sont évoquées, sans qu’il soit possible, à ce jour, de décider de la véracité de l’une ou de l’autre.

La première hypothèse d’action des hautes dilutions repose sur des interprétations purement physiques et quantiques. La seconde repose sur des hypothèses de présence résiduelle, dans ces dilutions, de nanoparticules.

Si des premières pistes d’élucidation sont donc à retenir, nous sommes conscients que la recherche fondamentale sur les hautes dilutions doit être poursuivie et approfondie.

Apports et contributions de l'homéopathie à la vision médicale actuelle 

          L'homéopathie propose au modèle médical actuel, 3 contributions importantes qui, il est essentiel de le dire, ne viennent ni s’opposer, ni contester, celui-ci mais permettent, au contraire, de l’enrichir et le compléter. On retiendra :

  • une méthode thérapeutique originale, fondée sur le principe de similitude entre les signes et symptômes du patient et ceux du médicament homéopathique à prescrire (chaque médicament homéopathique possède un vaste tableau de signes et symptômes provoqués et recueillis, lors d’expérimentation, à dose pondérale, sur l’homme « sain » (c'est à dire non malade).
  • une méthode pharmaceutique de fabrication des médicaments à usage homéopathique qui renvoie, quand à leur mode d’action et comme on l’a vu, à la nécessité de poursuivre les recherches entamées. L'homéopathie ouvre, ainsi, la voie vers une pharmacologie de l’infinitésimal.

- une conception  médicale singulière, complémentaire de la conception actuelle. On retiendra, à ce sujet, la proposition faite à la biologie et la médecine de prendre en compte un « nouvel » objet biologique, le patient dans sa dimension d’individu vivant, avec ses 5 conséquences corrélatives.

QUELQUES MOTS POUR CONCLURE

L'homéopathie, pour peu qu’on accepte de prendre en compte sa bio-logique, se montre, donc, tout à fait complémentaire à la biomédecine. Que ce soit sur le plan des dimensions biologiques prises en compte (ensemble des mécanismes biologiques élémentaires impliqués dans les maladies/dimension d’individu vivant), des vecteurs pharmaceutiques mis en jeu, des modes d’action biologiques impliqués et des conceptions médicales.

Nous partageons ce texte animé du souhait d’ouvrir, enfin, un véritable débat, dépassionné, sur l’homéopathie car nous sommes convaincu de l’intérêt de celui-ci pour la biologie, la médecine et toutes les sciences de la nature et de l’homme.